Le Mercredi 13 Octobre 2021, j’ai organisé un wébinaire sur les semences paysannes et l’agroécologie. Il a eu lieu dans le cadre du Mois de l’Agroécologie organisé par Agroecology Europe. Deux intervenants ont participé et apporté leurs expériences et leur ressenti sur ce thème:
Maxime Schmitt: Ancien ingénieur électricien, Maxime est aujourd’hui Oléiculteur en Italie. Il coordonne la Maison des Semences Paysannes Maralpines et enseigne la production de semences.
Bruno Viennois: Maraîcher du GAEC d’Artias en Haute-Loire sous mention Nature & Progrès depuis 2012 avec production d’une partie des semences cultivées sur la ferme et animateur de trocs de graines.
Je tenais à faire ce wébinaire car j’estime que les semences paysannes sont trop peu discutés lors des échanges autour de la transition Agroécologique. Les semences sont au cœur de l’agriculture et s’inscrivent dans des dimensions agronomiques, socio-culturelles, économiques et politiques de la transition agroécologique. Plusieurs enjeux majeurs, tel que la préservation de la biodiversité cultivée, l’adaptation aux changements climatiques, l’autonomie paysanne et la souveraineté alimentaire, y sont liés. Sur le terrain, dans les fermes, l’utilisation des semences paysannes impliquent différentes manières de travailler et de produire qui nécessitent parfois pour les agriculteurs de se réapproprier des pratiques paysannes et d’en créer de nouvelles. Le partage horizontal, en particulier par le biais d’échanges d’agriculteur à agriculteur, est essentiel dans cette dynamique de réappropriation des savoirs et savoir-faire paysans et participe à la co-création de connaissances pratiques et scientifiques, un des 13 principes de l’agroécologie (ces 13 principes sont disponibles en ligne, ainsi que la liste des 230 organisations et les 580 experts individuels signataires). Ce sont certains de ces aspects-là qui ont été explorés, discutés et débattus au cours de ce wébinaire.
Vous pouvez voir l’enregistrement vidéo ici:
Voici quelques-uns des points clés qui en sont ressortis:
- Il est essentiel de considérer les semences paysannes comme un ‘commun‘, qui n’appartient à aucun de nous mais dont nous sommes tous responsables. Un commun qui ne peux pas être approprié mais que nous devons savoir gérer, et pour lequel nous devons, ensemble, définir les règles d’usage permettant le développement et la pérennité de celles-ci.
- La co-création des connaissances et la formation sont fondamentales, tant sur les savoirs que sur les savoir-faire.
- On parle de semences ‘paysannes’ et non pas ‘anciennes’ car elles sont cultivées aujourd’hui, maintenant, dans nos territoires.
- Ne pas avoir un regard fixiste. La biodiversité cultivé est en perpétuelle évolution. Ce travail de co-évolution entre plantes cultivées et humains existe depuis 10000 ans et est ouvert à tous et toutes. Tous le monde est légitime pour continuer à le faire, nul besoin d’être un spécialiste.
- Produire ses propres semences et/ou participer à des échanges permet de baisser le niveau de dépendances auprès de filières industrielles sur lesquelles les paysans n’ont aucune possibilité d’influer et qui fonctionnent avec des techniques de sélection et d’amélioration génétique qui ont des objectifs uniquement industriels ne correspondant pas aujourd’hui à nos besoins de reproduction agroécologique.
- Faire ses semences, c’est aussi se faire plaisir et renouer avec une dimension supplémentaire dans le métier de maraîcher ou la passion du jardinier.
- Idée reçue: Les semences industrielles sont systématiquement plus productives que les semences paysannes: Il y a des exemples d’espèces de semences paysannes qui, dans la localité et avec les savoirs-faire qui vont avec, sont plus productives que les souches multipliées par les semenciers.
- Voir et considérer les maladies/pathogènes comme un enjeu avec lequel il faut composer, non pas par l’élimination drastique, mais par la diversité, et en travaillant avec des sols vivants, dans des champs diversifiés, avec des rotations de cultures bien faites, pour continuer à vivre avec ces maladies qui seront toujours présentes. Par exemple, en faisant bénéficier les bactéries et champignons qui sont bénéfiques pour nos cultures afin qu’ils occupent l’espace aux détriments des pathogènes nuisibles.
- La thermothérapie (voir ici et ici) est une solution accessible aux pratiques agroécologiques pour se réapproprier la responsabilité de faire attention au transfert de certaines maladies, lors de l’échange de semences.